Suppression des TER en Lozère : Bourquin s’explique enfin ! Notre analyse suite et fin

, par La rédaction

Dans une lettre réponse au député de Marvejols Pierre Morel A L’Huissier, le président de la région Languedoc Roussillon s’exprime enfin sur la politique des transports désastreuse qu’il mène en Lozère. L’élu lozérien a bien voulu la rendre publique et nous la communiquer.

En voici le texte intégral :


Montpellier, le 06 janvier 2014
 
DEMANDE D’INFORMATION sur LES ÉVOLUTIONS DE L’OFFRE DE TRANSPORT PUBLIC RÉGIONAL EN LOZÈRE
 
Monsieur le Député,
 
Par courrier, vous m’interpellez de façon excessive et caricaturale sur la politique régionale en matière de transport et plus particulièrement sur la desserte des lignes ferroviaires de Lozère. La politique de la Région est de promouvoir et d’améliorer l’offre de transport public régional.
 
Cette politique se concrétise par de nombreuses actions :
 

 Déploiement progressif d’une tarification très attractive avec le tarif à 1€. La ligne Lozérienne entre La Bastide et Marvejols bénéficie de cette nouvelle tarification régionale depuis l’été 2012.

 Investissements -hors compétence- dans l’amélioration des infrastructures
ferroviaires. Nous participons ainsi aux travaux de régénération des voies au nord d’A|ès (dans le cadre du Contrat de Plan Etat Région), ou ceux qui ont eu lieu
entre Belvezet et La Bastide à l’été 2009.

 Rénovation et achat de trains modernes. L’ensemble du parc a été remis à niveau et nous avons récemment acheté deux trains supplémentaires aptes à circuler sur les voies non électrifiées dont celles de Lozère pour améliorer et fiabiliser l’offre.

 

Sur le niveau de services, mon objectif est de répondre au mieux aux besoins locaux de déplacement tout e-n tenant compte du contexte économique que vous connaissez. Ainsi dans l’ensemble de la région, nous ajustons au mieux les moyens disponibles, les matériels roulants (train simple, train double ou autocar) et le volume de service en fonction des besoins et des fréquentations constatées et anticipées. Ces adaptations se traduisent par :
 

 Des renforcements de service là où les besoins augmentent : une augmentation
du nombre de services ou la transformation d’un service autocar en service ferroviaire.

 Des allègements de service là où la fréquentation est faible : transformation d’un
service ferroviaire en service autocar et/ou suppression de services peu ou pas fréquentés.

 
Sur le secteur lozérien, au vu de la faiblesse des fréquentations des trains, la SNCF nous a recommandé de réorganiser la desserte de l’axe La Bastide/Marvejols, objet de votre courrier. Un service aller-retour Mende / La Bastide et un service aller-retour Mende / Marvejols sont réalisés par autocar à compter du 15 décembre 2013. Les comptages réalisés sur ces services ferroviaires faisaient apparaitre les fréquentations suivantes :
 

 878981 Mende (8h46) / La Bastide (9h55) : 6 personnes en moyenne,
 878980 La Bastide (10h06) / Marvejols (12h01) : 13 personnes en moyenne,
 878983 Marvejols (13h53) / Mende (14h40) : 10 personnes en moyenne.

 
La fréquentation en Lozére étant bien supérieure durant la période estivale, ces 3
services seront réalisés par train en juillet et en août.
 
Pour être exhaustif, je vous indique que le service 877715 (Mende (16h50) / La Bastide (18h00)) est avancé à 11h47 avec une relation directe pour Nîmes. L’horaire 16h50 est maintenu les vendredis et dimanches où des besoins scolaires sont identifiés.
 
Vous attirez également mon attention sur la perception des services autocar par le public en signalant quelques retours négatifs de la part des usagers. Plutôt que de vous focaliser sur quelques informations non vérifiées, vous devriez vous référer aux enquêtes sérieuses. Ainsi, une enquête réalisée à bord des services autocar (auprès de plus de 160 usagers) indique au contraire une perception très positive de ces services :

 95,7% des usagers se déclarent satisfaits du service autocar,
 les services autocar sont évalués comme sûrs, propres et confortables (ces items sont tous notés a plus de 16/20 par les usagers).

 
La Région s’est en effet montrée très exigeante vis-à-vis des transporteurs routiers et a ainsi imposé la mise en service d’autocars modernes et très confortables (large espace entre les sièges, équipé de toilettes, véhicules accessibles aux personnes en situation de handicap...)
 
Une catégorie d’usagers est probablement mécontente : les cheminots et leurs ayants droits. En effet, la SNCF a refusé de leur accorder la gratuité des transports sur les services autocar alors qu’elle la finance sur les services ferroviaires.
 
La contribution versée par la Région à la SNCF pour faire circuler les trains régionaux est passée de 80M€ en 2007 a plus de 106.294€ en 2013. C’est une augmentation conséquente de notre budget qui atteste de ma détermination en faveur du service public de transport. Nous ne pouvons cependant aujourd’hui faire plus. La contrainte budgétaire actuelle est en effet croissante et difficilement soutenable dans un contexte où nos dotations de l’Etat restent stables, voire diminueront, quand les coûts de la SNCF continuent de dériver dangereusement.
 
Outre votre mandat de Député, vous êtes vous-même élu d’une collectivité territoriale, vous connaissez donc le contexte budgétaire actuel des collectivités. Celui-ci impose de mener une gestion toujours plus attentive des deniers publics. Les adaptations en cours répondent à une double préoccupation : le maintien d’un service public répondant aux besoins tout en gérant au mieux les deniers publics.
 
Voici les faits : un service public adapté aux besoins des voyageurs et économie de l’argent du contribuable. Alors une question se pose : qui sabote le service public ? La collectivité régionale qui gère au mieux le service dans l’intérêt des habitants et de l’activité économique ou un élu de la République qui emploie des termes racoleurs (fiasco, sabotage...) pour promouvoir un discours qui appelle à la gabegie. Je vous laisse en juger en votre âme et conscience.
 
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Député, l’expression de ma haute considération.
 
Le Président de la Région
Languedoc-Roussillon
Christian BOURQUIN

Notre analyse suite et fin
 
Nous reconnaissons dans cette réponse au député UMP de Lozère le ton traditionnellement emporté et revanchard du président de région. Et la fin du courrier n’est pas piquée des hannetons, il accuse son correspondant d’appeler à la gabegie. Nous savons que les échanges politiques sont toujours ’courtois’ mais là on le sent... énervé et sur ses gardes.
 
Tous les prétextes sont bons dans ses réponses toujours border line, toujours limites. Il justifie par exemple l’inexistence d’une politique volontariste de transports en zone rurale et de montagne par des pirouettes :
 
 il n’ y a personne dans ces trains de Lozère sauf des cheminots nantis, qui voyagent gratos, qui ne peuvent plus le faire dans les bus, et d’ailleurs c’est pour ça qu’ils lui en veulent,
 
 il n’y a personne dans ces trains, d’ailleurs les enquêtes de fréquentation le lui disent... Et quand on sait comment elles sont menées on peut leur faire confiance hein... Mais Monsieur Bourquin aime les sondages. Trop.
 
 les nouveaux usagers des autocars sont ravis à 93% ... Mais d’où sortent ces chiffres ? Qui peut le croire ?
 

Nous lui conseillons de fermer purement et simplement les gares de Lozère, ce qu’il a déjà commencé à faire les week-ends, de poursuivre donc son oeuvre le plus vite possible, et de les transformer en arrêt de bus (voir notre article). Ca lui coûtera encore moins cher, il pourra revendre l’acier des lignes et le bois des traverses à bon prix, ce qui lui permettra de financer plus facilement le tronçon TGV Montpellier Perpignan dont il rêve. La ville de Mende qui se dépeuple selon les derniers pointages de l’INSEE, 215 habitants entre 2006 et 2011, ne lui en sera que plus reconnaissante.
 
Notre première analyse était assez pertinente. Voilà en tous cas un président de région qui aura tout compris de la gestion des territoires. Quand on le compare à ses voisins, Michel Vauzelle en PACA qui a rouvert plusieurs lignes, Lucien Malvy en Midi-Pyrénées qui a rénové entièrement son réseau, hors compétence comme les autres, René Souchon en Auvergne qui manifeste une volonté de tous les instants à son maillage ferroviaire, on se dit que triste est l’avenir du Languedoc Roussillon malgré les effets de la com qui, elle, y est florissante. Au moment où l’on discute de la diminution et l’éclatement des régions, on ne peut que souhaiter que cette région explose et que la Lozère soit rattachée à l’Auvergne ou Midi-Pyrénées par exemple. Elle y aurait sûrement tout à gagner.